Le monde de Christina
« Si l’on ne fait que jeter un coup d’œil en passant, ce tableau dépeint une scène douce et champêtre : une jeune fille allongée dans l’herbe regarde tranquillement un groupe de bâtisses juchées en haut d’une colline.
Mais si l’on s’arrête un instant, on voit, on sent que quelque chose ne va pas : l’herbe est trop roussie, comme une steppe infernale. Quelque chose ne va pas, vraiment : la maison est trop loin, trop sombre. Les critiques d’art nous expliquent que ce malaise, dans l’esprit du spectateur, vient de la perspective quasi-impossible, puisqu’on voit la jeune fille d’en haut, et qu’on voit d’en bas les maisons sur la butte. Dans ce cas, où sommes-nous donc placés ? Et puis, la jeune fille dégage quelque chose de bizarre, elle aussi.
Alors, on la regarde de plus près, on cherche d’où vient notre sentiment de malaise… »
J’ai toujours été fasciné par ce tableau de Wyeth, que je présente, au travers des lignes qui précèdent, dans mon dernier livre. Je me souviens très bien de ce jour où je l’ai vu pour la première fois, au MOMA, lors d’un voyage à New-York alors que j’étais étudiant.
Son histoire est passionnante, et l’une des meilleures introductions à cette œuvre figure au bout de ce lien. Je ne vous en dis pas plus ici, mais je vous invite à prendre le temps de vous y rendre, pour comprendre comment tout un univers est en général dissimulé derrière une peinture.
Et il en est de même de nos vies : un regard rapide sur elles ne permet jamais de deviner tout ce que cachent les coulisses, de souffrances et d’efforts. Certains jours nous aimerions que les autres se rendent davantage compte de ce monde que nous hébergeons. Et à d’autres, nous réalisons que c’est sans doute bien mieux ainsi, que chacun de nous garde ses secrets…