Délit de fuite
Je bavardais l’autre jour avec un ami du délit de fuite : que se passe-t-il dans la tête d’un automobiliste, lorsqu’il s’enfuit après avoir renversé un passant ou un cycliste ?
Peut-on en tirer des conclusions ? Généraliser sur la nature humaine ? C’est vrai que le délit de fuite a quelque chose de glauque et de troublant. Il semble donner raison aux pessimistes sur la nature humaine. Il a presque toujours lieu lorsque l’accident s’est produit sans témoins : il n’est pas seulement un réflexe (on fuit par peur de la « punition ») mais aussi un calcul (on fuit aussi par espoir de ne pas être justement identifié). Et c’est cette dimension de calcul qui est moche.
Je me souviens d’avoir été très perturbé, alors que j’étais étudiant, par un fait divers rapporté dans La Dépêche du Midi : un joueur du Stade Toulousain avait un soir renversé un cycliste et s’était enfui. Comment un type si courageux sur le gazon avait-il pu se montrer si lâche sur le bitume ? À l’époque, ça m’avait déconcerté. Aujourd’hui, je sais que nous sommes tous exposés à ça. La peur et la lâcheté peuvent lézarder nos valeurs. Notre personnalité ne peut prédire nos comportements que si les circonstances sont calmes ou habituelles. Si nous sommes bousculés, les prédictions sur ce que nous ferons sont plus incertaines.
Des solutions ? Oui, je pense qu’il y en a : notamment du côté de la psychologie positive et de l’éducation en général. Inlassablement éduquer aux valeurs d’entraide et d’altruisme, en parler, en discuter, les mettre en œuvre sur de tout petits moments du quotidien… Que faire de mieux ?
Illustration : Les Pas perdus, de Jean Dubuffet, 1979.