Drôle de dédicace…
Ça s’est passé l’autre jour, alors que je dédicaçais mon dernier livre après une conférence. Il se passe presque toujours des choses lors des dédicaces : ce sont des moments de relative intimité entre lecteur et auteur, sous la contrainte du temps, donc souvent plus intenses qu’on ne pourrait l’imaginer…
Une dame sympathique mais avec quelque chose de spécial dans le regard et la parole s’approche, et me demande de remettre mes lunettes, que j’avais enlevées pour signer : « vous les aviez pendant toute la conférence, je ne vous reconnais plus, ça me trouble ! » Ça me fait rire, alors je les remets pour lui faire plaisir. Elle est ravie, et me demande alors sa dédicace :
– “C’est pour mon fils.
– Ah, très bien. Il apprécie la psychologie ?
– Non, non, pas du tout. Mais il a plein de problèmes.
– Je vois. Il va le lire sur vos conseils ?
– Sûrement pas ! Il déteste ça. C’est pour quand je serai morte.
– Pour quand vous serez morte ?
– Oui, chez moi il y a tout un rayon de livres de psychologie que j’aime bien et que je lui léguerai. Après ma mort, il viendra chez moi récupérer mes affaires, il tombera sur ce rayon, et quand il ouvrira les livres, il verra qu’il y en beaucoup qui sont dédicacés à son prénom. Ça devrait le motiver pour qu’il se mette à travailler sur lui ; il en a besoin, mais il lui faut un choc, il fonctionne comme ça.
– Ah… Euh… Bon… C’est quoi son prénom ? »
Elle était tellement bizarre, l’histoire de cette dame, que je ne savais plus que dire ; et puis la file derrière elle était encore conséquente, ce qui est une autre motivation à ne pas faire trop long. Mais c’était la première fois qu’on me racontait quelque chose comme ça.
J’espère que la dame ne va pas mourir trop vite, et surtout que son fils n’attendra pas sa disparition pour ouvrir son premier livre de psychologie…
Illustration : tout pleins de livres dédicacés dans une belle bibliothèque…