Parlons, tant que nous vivons


Sur la tombe de mon père, dans un petit cimetière près de Toulouse, avec mes filles et mon épouse. Nous avons amené quelques fleurs, arrosé celles qui étaient là. Nous sommes maintenant debout, tous les cinq, silencieux. Pas facile de parler ou de prier à voix haute, ensemble. Mais on ne va pas rester comme ça, attristés et embarrassés, sans rien dire, tout de même ! Dans ces moments, je me sens « chef de famille » : c’est à moi de faire quelque chose.
Alors je demande à chacun(e) d’entre nous de penser à Papi, de laisser venir à sa mémoire tous les bons souvenirs qui nous restent de lui, toutes les images, les paroles, les petits gestes et petites attentions qu’il avait au quotidien.
Les yeux se mouillent un peu, on avale sa salive, on est content de repenser à ces moments, et bien triste aussi qu’ils soient révolus. On se dit plein de choses, tout se bouscule, c’est compliqué. Mais nous communions et nous éprouvons l’amour et l’affection qui existaient dans le lien que nous avions avec lui. Lui qui n’était pas très à l’aise, comme tant de personnes de sa génération, pour exprimer son affection ; mais finalement, en y repensant aujourd’hui, il n’arrêtait pas de nous la communiquer.
Je repense à cette phrase de Montherlant (lue la veille, je vous rassure, les phrases de Montherlant ne viennent pas comme ça à ma conscience dans les grands moments) : « Ce sont les mots qu’ils n’ont pas dits qui font les morts si lourds dans leurs cercueils. »
Puis, une de mes filles dit une petite phrase qui fait rire ses deux sœurs, un peu oppressées par la tristesse et la relative solennité de l’instant. C’est fini. C’était bien. Très bien. Je suis heureux.