Président


Dans mon quartier réside un clochard (je dis clochard et non SDF, car il est plutôt bien intégré, il me semble ; en tout cas, autant qu’on peut l’être lorsqu’on vit dans la rue).
Il bavarde souvent à la sortie des cafés et des commerces avec des passants qu’il connaît et croise chaque jour, comme les employés de la voirie (je n’ose plus dire « balayeurs », on a l’impression de les insulter en les appelant comme ça ; et puis, ils sont maintenant souvent équipés, certains jours, de petits camions à arroser, alors il faudrait dire « balayeurs-arroseurs »…).
L’autre jour, en passant, j’entends leurs saluts, plutôt joyeux : « Salut Monsieur le Président ! » lançait le balayeur (oups…). « Salut patron » répondait le clochard.
Ce détournement de titres et de fonctions m’a ravi. Je n’y ai vu aucune ironie ni aucune amertume : juste une manière, dans un même mouvement, de se marquer de la considération et de se moquer des puissants.