Trop de psy dans nos vies ?

Certains pensent qu’il y a trop de psychologie dans nos
vies. Parfois, ce sont des psys eux-mêmes qui disent ça, les pédo-psys par
exemple : ils constatent que beaucoup d’enfants qu’on leur envoie n’ont
pas véritablement de problèmes psychologiques mais simplement des problèmes
éducatifs : on ne leur a pas appris la frustration, on ne leur a pas dit
assez non, on les a beaucoup aimés mais assez peu éduqués…

Et puis, d’autres disent que c‘est l’inverse, et qu’il n’y a
pas assez de psychologie dans nos vies. Que si dans notre vie de couple, en
famille, au travail, nous avions appris à mieux nous écouter, mieux nous
parler, mieux nous comprendre et nous respecter, il y aurait moins de conflits
et moins de souffrances.

Peut-être ne parle-t-on pas de la même chose, d’ailleurs,
quand on parle du « trop de psy » : est-ce trop de recours à la
psychothérapie (envoyer ses enfants ou son conjoint chez le psy dès qu’il nous
dérange ou se plaint) ? Ou est-ce, plus largement, de trop avoir recours à
la psychologie pour comprendre et améliorer notre vie ?

Sur ce dernier point, pas mal de gens pensent,
effectivement, que bon sens et bonne humeur devraient suffire pour bien
conduire une vie humaine…

C’est une façon
de voir les choses qui se défend, mais ça ne marche pas pour tout le monde, et
ça ne satisfait pas non plus tout le monde. D’où pour certaines personnes,
l’envie d’un peu de psy, car tout ne se résout pas en trinquant et en chantant…

De toute façon,
nous autres occidentaux vivons dans des sociétés de pléthores, où il y a
globalement trop de tout. Regardez chez vous et autour de vous : trop de
nourriture, trop de fringues, trop d’objets inutiles, trop d’informations, trop
de tentations… Le « trop de psy » n’est peut-être pas le pire des
« trop de » que nous ayons à affronter !

Et puis, ce
sentiment de « trop de psy », c’est peut-être un bon signe, le signe
que nous avons satisfait nos autres besoins fondamentaux.

Vous connaissez
la fameuse pyramide de Maslow, cette loi psychologique qui explique qu’il
existe une hiérarchie de nos besoins, et qu’ils ne peuvent survenir que les uns
après les autres. Il y a d’abord les besoins liés à notre survie : manger,
boire, dormir ; lorsqu’ils sont satisfaits, peuvent alors émerger les
besoins liés à notre sécurité : pouvoir vivre en paix, dans des
environnements sans danger ; puis viennent les  besoins d’appartenance, besoins d’amour,
d’amitié, de solidarité…

Et c’est seulement
lorsque tous ces besoins fondamentaux sont satisfaits qu’on accède à des
besoins plus spécifiquement psychologiques : besoin d’estime de soi,
d’autonomie, de réalisation de soi, de transcendance…

Une société où
on se pose la question du « trop de psy » c’est donc une société qui,
a priori, et pour la majorité de ses citoyens, a réussi à répondre à tous les
besoins plus fondamentaux (nourriture, logement et citoyenneté). Plutôt
réjouissant.

Mais nous
sommes d’accord : ce n’est pas une raison pour envoyer tout le monde sur
le divan ! Éduquons nos enfants, sans déléguer ça aux écrans ou aux psys.
Écoutons nos proches et exprimons-leur nos émotions. Parlons-nous les uns les
autres, entre voisins et entre inconnus. Engageons-nous, militons, votons…

Rendons à la
psy ce qui relève de la psy, et à la vie ce qui relève de la vie. On y verra
déjà un peu plus clair !

Et au fait, vous, est-ce
que vous avez tendance à parler trop souvent de psychologie ?

Illustration : tout de même, un bon psy, ça fait du bien rien que quand on le voit nous attendre sur le pas de sa porte…

PS : ce texte reprend ma chronique du 8 mai 2018, dans l’émission de mon ami Ali Rebehi, “Grand bien vous fasse“, tous les jours de 10h à 11h sur France Inter.